La programmation danse du Théâtre des Champs-Elysées pour la saison 2019-2020 est sur le papier riche de promesses. Elle s’ouvrait en ce début octobre avec la venue du Ballet Preljocaj pour présenter la dernière création de son chorégraphe et créateur, une soirée « full length » autour des lieder de Voyage d’Hiver (die Winterreise) de Schubert.

Angelin Preljocaj a initialement conçu cette pièce d’1h20 pour 12 danseurs  pour une troupe classique, le Ballet de la Scala de Milan. Il l’a depuis remontée avec sa propre troupe. James Vaughan au piano-forte et le baryton basse Thomas Tatzl, qui étaient également de la création à la Scala, ont poursuivi le voyage avec le Ballet Preljocaj.

Winterreise – Angelin Preljocaj – Teatro alla Scala Ballet (copyright: Brescia e Amisano)

C’est assez dur pour moi de livrer une analyse détaillée de ce spectacle: j’ai découvert l’œuvre musicale en même temps que le ballet et je n’avais pas spécialement approfondi avant les 24 poèmes de Wilhelm Müller mis en musique par Schubert. Leur lecture m’aurait sans doute fait apprécier différemment cette soirée, j’aurais cherché à faire le lien entre la signification littérale des poèmes et les images et mouvements créés par Angelin Preljocaj. Au lieu de cela, je me suis contentée de « ressentir » le spectacle sans analyse intellectuelle poussée.

Dès le premier lied, avec le chanteur qui marche vers l’avant-scène, s’extrayant de l’ensemble des danseurs, tout de noir vêtus, évoluant dans la semi-pénombre sur un plancher recouvert de cendres, le cœur se serre et on est entraîné dans un voyage intérieur, où le spleen et la nostalgie du temps qui passe sont traversés d’éclaircies aux couleurs de l’espoir.

Il n’y a rien de fabriqué ou d’attendu dans la chorégraphie d’Angelin Preljocaj. Le dialogue entre musique et danseurs est fluide, on sent le chorégraphe habité par son sujet: son art atteint ici une forme d’épure. On retrouve bien les marqueurs du chorégraphe du Parc, la rigueur d’une base résolument classique au service de la danse contemporaine, mais sans la volonté d’en mettre plein la vue. Lumières et costumes sont à l’avenant: pas d’esbroufe coûteuse et tape à l’œil. Juste une œuvre, certes exigeante par moment, qui va à l’essentiel, et qui, à mon sens, se doit d’être revue pour s’apprécier pleinement. On aimerait presque d’ailleurs être isolé dans une bulle pour ce faire : Angelin Preljocaj aurait-il créé le ballet de chambre?

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