En 1967, Roman Polanski réalisait une parodie de film de vampires, le Bal des Vampires. Avec son Technicolor flamboyant, sa reconstitution d’une Transylvanie assez fidèle à ce que l’on imagine en lisant le roman de Bram Stoker et son scénario inventif, cette parodie égale voire surpasse ses modèles, les films produits par la Hammer avec Christopher Lee dans le rôle du Comte Dracula, et a été la carte d’entrée à Hollywood de Polanski. On y retrouve les archétypes du genre légèrement détournés : le chasseur de vampires érudit en voyage d’études en Transylvanie, son assistant Alfred (incarné par Roman Polanski), amoureux transi d’une demoiselle en détresse (la plantureuse Sharon Tate) qu’il va tenter de sauver des dents du Comte Von Krolock tout en échappant aux avances du fils du Comte.
Ce film a donné le jour à une comédie musicale en allemand en 1997, mise en scène par Roman Polanski lui-même, sur un livret du parolier allemand Michael Kunze et des compositions de Jim Steinman du groupe Meat Loaf, « inventeur » du concept de rock wagnérien. Fort d’un succès international, le spectacle est adapté en français pour être la nouvelle production du Théâtre Mogador.
Ceux qui aiment le film, sans être fans de « musicals », devraient apprécier ce spectacle et passer outre les paroles inégales des chansons et le côté excessif inhérent au genre. C’est mis en scène avec efficacité et brio, les comédiens se donnent à fond et la scénographie somptueuse recrée la magie de l’histoire originale. C’est particulièrement vrai dans le premier acte situé dans l’atmosphère joyeusement enfumée d’une auberge de village dont les occupants font une consommation excessive d’ail. Il y a un bon équilibre entre les scènes de comédie loufoque portées par le professeur – chasseur de vampires et l’aubergiste, la comédie romantique et le drame horrifique. L’espace scénique est astucieusement utilisé et l’apparition des vampires dans la salle ou l’entrée spectaculaire du Comte garantissent l’immersion du spectateur. Le deuxième acte, qui se déroule essentiellement dans le château du Comte, pâtit peut-être du syndrôme du « toujours plus ». Ce sont les scènes « intimistes », reprises du film, qui emportent l’adhésion: le professeur et Alfred dans le caveau, la scène de ménage entre l’aubergiste et la servante devenus vampires, la scène de la bibliothèque ou la confrontation entre Alfred et le vampire homosexuel. A l’exception du bal qui donne son titre au spectacle, j’ai été moins convaincue par le côté « Rocky Horror Picture Show » de certaines scènes d’ensemble. Pourquoi ne pas avoir gardé la fin originelle et son twist génial et conclure avec une bande de vampires au look gothico-métal tout droit sortis d’Underworld ?
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