Ambitieuse programmation que celle proposée par Élisabeth Platel pour le spectacle annuel de l’École de Danse qu’elle dirige depuis 2004. Comme l’an dernier, on sort de la soirée en se disant qu’on aimerait que toutes les soirées mixtes des « grands » aient le même niveau d’exigence en termes d’intérêt et de mise à l’épreuve de la virtuosité des danseurs. Un peu comme si Elisabeth Platel avait voulu défier les critiques implicites de Benjamin Millepied sur l’école pendant son court passage.
Chacune des chorégraphies proposées pour cette soirée fait d’ailleurs partie du répertoire de la « grande maison », et l’on retrouve Balanchine et Forsythe, deux incontournables des saisons signées Millepied.
On commence par Divertimento N° 15, une pièce d’inspiration mozartienne de Balanchine. Tout l’art de Mr. B resplendit dans cette chorégraphie qui met en scène 5 ballerines courtisées par 3 jeunes gens, entourée par un corps de ballet exclusivement féminin de 8 danseuses, évoquant le raffinement des fêtes galantes. Si les jeunes interprètes réussissent à échapper à une approche purement scolaire et à raconter une histoire sur ce ballet sans histoire, il leur manque cependant l’assurance technique, la vitesse d’exécution et un zeste d’audace pour donner une autre dimension à l’œuvre. Les jeunes filles s’essaient timidement au fameux déhanché tandis les jeunes gens gèrent plutôt bien les pièges du partenariat. Bleuenn Battistoni est une des valeurs sûres de l’Ecole de Danse et le prouve avec une présence séduisante sur scène et une danse musicale : elle avait échoué de peu pour intégrer le corps de ballet l’an dernier et j’espère qu’elle concrétisera cette année. Le soliste masculin principal, Anicet Marandel, a de faux airs de José Martinez, beaucoup d’élégance, un partenariat attentionné et assuré.
Avec the Vertiginous Thrill of Exactitude, on n’est plus vraiment dans le spectacle d’école joli mais un peu fade. Visiblement le vocabulaire chorégraphique de William Forsythe inspire plus les jeunes danseurs, ou les danseurs distribués sur cette pièce phare sont-ils tout simplement un cran au-dessus ? Il est vrai que Bianca Scudamore et Daniel Lozano-Martin avaient déjà tapé dans l’œil des spectateurs qui avaient assisté aux Démonstrations cet hiver : ce sont des graines d’étoile. J’ai beaucoup apprécié également Alexandre Boccara, doté du plus joli ballon de la soirée, et Philippine Flahault. Douze minutes toute en accélération qui « énergisent » le spectateur et qui feraient prendre Schubert pour un compositeur électro.
La soirée se termine par le troisième acte de Raymonda. La production de Noureev prend la poussière dans les entrepôts du boulevard Berthier. Sur le papier, c’est donc sympathique de découvrir autrement que sur une vidéo You Tube ce classique en voie d’oubli dans le répertoire parisien. En réalité, cela s’avère l’Everest pour une distribution junior, notamment pour les danseurs masculins qui ne disposent pas encore de l’arsenal technique et de la puissance nécessaire pour s’emparer du plateau. Dans le rôle-titre, Margaux Gaudy-Talazac fait quant à elle preuve de beaucoup d’autorité dans la variation de la claque. Son prince, Jean de Brienne, interprété par Milo Avêque est plus fragile, mais j’ai trouvé le partenariat très attendrissant.
Au final, ce spectacle 2017 m’a semblé moins équilibré que celui de 2016, avec des pièces d’une extrême difficulté technique qui laissaient trop peu de place au tempérament artistique des danseurs.
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