A l’issue de la représentation d’Orphée et Eurydice du 31 mars, Marie-Agnès Gillot a quitté officiellement les ors du Palais Garnier. C’est une page qui se tourne, car Marie-Agnès Gillot était la dernière des étoiles en activité (si l’on excepte Eleonora Abbagnato qui est une « célébrité » en Italie) à avoir une petite notoriété auprès d’un public dépassant les amateurs de danse, au travers de ses incursions dans l’univers du show-business (les Enfoirés, des clips ou un télé-crochet consacré à la danse).
En tant que spectatrice, j’ai finalement peu de souvenirs de Marie-Agnès Gillot. Il y a la superbe Myrtha de la captation télévisée de Giselle avec Laetitia Pujol et Nicolas Le Riche en 2007, en plein dans une première décennie glorieuse des années 2000 où elle alterne les classiques et les créations.
Mon premier souvenir « en live », c’est Cendrillon à Noël 2011, pas forcément le plus grand ballet de Rudolf Noureev, mais un rôle qui doit trouver une résonance particulière chez celle dont le physique athlétique ne semble pas correspondre aux canons de la ballerine type. Un physique qui l’a également cantonnée à une carrière assez « solitaire » : je me faisais cette réflexion au moment des adieux, pour la plupart des ballerines, on les associe souvent à un ou des partenaires de prédilection. Marie-Agnès Gillot est soliste avant tout, et le dernier pas de deux d’Orphée et Eurydice, à contre-courant des lois du genre, est représentatif du rapport de MAG à ses partenaires.
Les 5 dernières années, je ne l’ai vue que 11 fois dont 3 dans Orphée et Eurydice, contre plus d’une trentaine pour Karl Paquette qui est de la même génération. A croire que, hormis les chorégraphes invités qui la demandaient, la direction de la danse ne savait plus comment la distribuer. A part Orphée et Eurydice (qui est d’ailleurs plus le ballet d’Orphée), mes souvenirs d’elle, ce sont exclusivement des programmes mixtes, généralement contemporains, où elle assurait dix minutes d’apparition souvent spectaculaires, et comme ces soirées sont rarement celles qui laissent l’impression la plus durable dans l’esprit du spectateur, c’était un peu frustrant. Sans parler de son ultime série de Boléro qui laisse un sentiment mitigé.
Au final, durant cette fin de carrière à l’Opéra, la danseuse a, peut-être à tort, renvoyé l’image d’une danseuse un peu froide, sans faille, exécutant avec une perfection mécanique les mouvements défiant les lois de la physique imaginés par Wayne McGregor. Il a fallu attendre se adieux pour qu’elle me fasse verser ma première larme, en s’asseyant tout simplement sur le bord de la scène, quelques roses rouges et blanches, éparpillées autour d’elle, avant que son fils ne vienne la rejoindre pour une embrassade très émouvante.
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