Le printemps est décidément très classique cette année. Après Le Lac des Cygnes, c’est au tour de l’Histoire de Manon et de Paquita de prendre la relève sur la scène de l’opéra. En comparaison de la répétition plutôt agitée du Lac, l’atmosphère est apaisée en ce samedi ensoleillé pour retrouver Myriam Ould-Braham et Germain Louvet dans une séance de répétition de Paquita dirigée par Agnès Letestu et Pierre Lacotte.
Myriam Ould-Braham est très chaleureusement applaudie à son entrée, pour ce qui constitue un retour face au public après un congé de maternité. Elle ressemble plus que jamais à la Petite Danseuse de Degas. La verrons-nous avec Germain Louvet au mois de mai? Rien n’est moins sûr. Dans les distributions initialement publiées, Myriam Ould-Braham apparaissait au côté de Mathias Heymann, mais son nom a été retiré depuis. Germain Louvet ne figure sur aucune des dates à ce jour. On n’en saura pas plus: Agnès Letestu évoque un couple recomposé et laisse ainsi entendre qu’ils ont déjà un peu répété ensemble. Pourraient-ils apparaître en fin de série? Ils forment en tout cas un couple joliment assorti physiquement sur la scène de l’amphithéâtre Bastille.
Pierre Lacotte introduit la séance avec un petit exposé très pédagogique sur le ballet et le contexte de sa création. Paquita fait partie de ces grands ballets emblématiques de l’école de danse française, créés à l’Opéra rue Le Peletier au XIXème siècle. Ce ballet créé par Joseph Mazilier en 1846 est un exemple frappant de l’influence des danses espagnoles amenée en France par la ballerine Fanny Elssler, rivale “terrienne” de Marie Taglioni, incarnation du rêve et de la poésie, sublimée dans la Sylphide. Les deux danseurs de la création sont Carlotta Grisi (créatrice du rôle de Giselle) et Lucien Petipa (frère aîné de Marius). Le thème est très simple. Paquita est une jeune aristocrate qui a été enlevée par des gitans et gardée au secret. La seule chose qu’elle ait conservée de son passé est un médaillon avec une miniature de son père. Par hasard, lors d’une cérémonie commémorative sur les lieux où a été tué son père, elle croise le chemin de Lucien d’Hervilly. Après un certain nombre de péripéties dans la veine du roman de cape et d’épée, ils s’échappent des griffes du méchant Inigo, le chef des gitans et ravisseur de Paquita, et Lucien va lui prouver son amour au point de l’amener à une réception qui se tient dans le château de ses parents. Dans ce château, elle tombe sur un portrait identique à celui du médaillon, ce qui prouve qu’elle est aristocrate et lui permet d’épouser Lucien.
Pierre Lacotte a recréé ce ballet en 2001 pour l’Opéra de Paris en se basant sur la version de Joseph Mazilier et non pas sur la version importée en Russie par Marius Petipa qui avait vu danser Paquita à Paris par son frère. Il conserve néanmoins le célèbre grand pas chorégraphié par Marius Petipa.
Place ensuite à la danse avec la répétition de trois passages (la rencontre de Paquita et Lucien, le pas de deux du rocher et enfin le pas de deux du mariage) sous la houlette d’Agnès Letestu et la discrète supervision du maître, assis côté cour. Pierre Lacotte intervient de temps à autre pour distiller des commentaires toujours instructifs sur le ballet et la troupe en général, laissant le soin à Agnès Letestu de faire les corrections, dans une très belle illustration par l’exemple de la transmission dans la danse.
Au passage, Pierre Lacotte valide la stratégie de distribution de la nouvelle direction, qui lance très tôt de jeunes danseurs, et complimente Germain Louvet, qui “doit encore travailler” mais à tout pour devenir un très grand danseur.
Agnès Letestu a l’art de savoir traduire en mots simples les intentions de jeu, allant même jusqu’à proposer une version chantée de la partition. Grâce à ses explications, on saisit l’importance de la pantomime dans ce ballet, et le véritable dialogue qui s’instaure entre les danseurs par ce moyen. L’association de Myriam Ould-Braham et de Germain Louvet apparaît prometteuse sur le plan du jeu, avec beaucoup de finesse et de raffinement dans la gestuelle et les regards. Sur le plan technique, c’est encore un peu chaotique: Myriam Ould-Braham est courageuse d’accepter de se présenter pour son retour pour une simple séance de travail, sans aucun des artifices du spectacle fini, avec un partenaire très peu expérimenté, mettant ainsi à nu le processus créatif avec ces hésitations et ces doutes.
Paquita sera donné à l’Opéra Garnier du 2 au 19 mai avec comme duos annoncés: Karl Paquette avec Laure Hecquet puis Amandine Albisson, Hannah O’Neill et Mathias Heymann, Alice Renavand et Florian Magnenet et enfin Léonore Baulac associée à Jérémy Loup-Quer.
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