Pour sa 13ème édition, les Etés de la Danse recevaient une compagnie habituée de l’événement, l’Alvin Ailey American Dance Theater qui, avec 5 invitations, est le recordman incontesté du genre. Il faut dire que la danse contemporaine version Alvin Ailey, bien loin des spectacles (souvent) prises de tête du Théâtre de la Ville, est un grand spectacle populaire capable de remplir les salles au-delà des amateurs de danse et donc d’assurer la pérennité des Etés de la Danse.
Le Théâtre du Châtelet étant fermé pour travaux, c’est à la Seine Musicale, la nouvelle salle de spectacle de l’Ouest parisien qui dresse son architecture imposante sur l’Ile Seguin, que les danseurs américains ont posé leurs valises. Jean-Luc Choplin, qui préside aux destinées de ce lieu culturel après avoir dirigé le Châtelet, accueille ici un premier spectacle scénique assez représentatif de sa patte. En attendant les grandes comédies musicales de la saison prochaine, la troupe fondée par Alvin Ailey offre un avant-goût de l’efficacité de l’entertainment à l’américaine avec une danse athlétique et spectaculaire, métissage entre danse classique et influences des cultures afro-américaine et populaire (danses tribales, modern jazz, gospel ou soul).
Forte d’une première découverte de la troupe à l’occasion des Etés de la Danse 2015, j’ai volontairement choisi, parmi les 5 programmes proposés, celui qui regroupait 4 pièces historiques d’Alvin Ailey, avec en point d’orgue un chef d’œuvre qu’on ne se lasse pas de revoir, Révélations. Si l’on excepte un placement au parterre désastreux pour la première partie (la scène n’est vraiment pas conçue pour la danse, on ne voit que le haut du corps des danseurs des premiers rangs du parterre) et l’absence de distribution avec les noms des danseurs du jour, l’après-midi du 22 juillet s’est avérée une conclusion réjouissante à la saison de danse parisienne.
Night Creature est une pièce de divertissement pur, qui, sur les rythmes de Duke Ellington, évoque un univers à la Cotton Club, avec des ensembles impeccablement réglés. Avec Cry, place à une veine plus introspective : ce solo de 17 minutes pour une soliste retrace les luttes de la femme afro-américaine au fil de l’histoire, bouleversant et très fort sans jamais être démonstratif. Blues Suite, une des premières œuvres d’Alvin Ailey, est une chronique du sud profond, une succession de saynètes entre mélancolie et humour.
Avec Révélations, on a un peu la synthèse parfaite de ces trois pièces. Cette petite demi-heure de grâce aux sources du gospel et du negro-spiritual vaut à elle seule de se déplacer. C’est la pièce signature de la troupe, et l’on est étonné de l’authenticité et de la fraîcheur de l’interprétation pour ce ballet sans doute dansé des centaines de fois. On peut se recueillir avec les ensembles dont émane une profonde spiritualité, être fasciné et ému par un solo masculin introspectif ou, dans le final à l’enthousiasme communicatif, taper la mesure avec ses mains et ses pieds pour faire honneur à une formidable compagnie.
Mots Clés : Alvin Ailey,Blues Suite,Cry,Etés de la Danse,Night Creature,Revelations