C’est parti pour cette série de représentations qui va nous conduire jusqu’à la fin d’année. Ouf! Le couple annoncé sur la feuille de distribution est bien Ludmila Pagliero et Karl Paquette. Du côté des seconds rôles, Christophe Duquenne remplace Florian Magnenet prévu en Espada.
Pour Ludmila Pagliero, c’est un baptême du feu: c’ est en tant qu’étoile de l’Opéra de Paris, son premier rôle principal dans un grand ballet du répertoire. Elle est accompagnée de Karl Paquette, un partenaire expérimenté qui, lui, a joué quasiment tous les rôles de ces grands ballets. Ils s’apprêtent à assurer trois représentations en 8 jours, 7 pour elle au total et 12 pour lui.
Autant dire que le stress doit être au rendez-vous. La moindre blessure serait pénalisante et un véritable casse-tête pour la Direction, étant donné le nombre de blessés parmi les étoiles.
Ludmila Pagliero a relevé brillamment le défi. Elle a donné immédiatement le ton de sa soirée, avec une entrée spectaculaire, toute en explosivité. En comparaison, Karl Paquette a semblé plus timoré dans ses solos de l’acte I, avec des réceptions hésitantes. Néanmoins, on doit reconnaître que leur partenariat fonctionne bien comme le laissait deviner la répétition publique du 26 octobre, et Karl Paquette est vraiment un maître des portés: dans le coda de l’acte I, il enchaîne les portés à une main, sans difficulté apparente.Dans les ensembles de l’acte I, on retiendra également la belle présence de François Alu parmi les pêcheurs.
L’acte II démarre avec mon passage préféré du ballet, le pas de deux au clair de lune. Tout est fluide, les danseurs sont comme liés l’un à l’autre. Karl Paquette semble s’être libéré. On enchaîne avec les danses gitanes, où Allister Madin se taille un beau succès.
Au royaume des Dryades, Ludmila Pagliero, transformée en la Dulcinée des rêves de Don Quichotte, impressionne encore, par sa technique parfaite, que font briller ses partenaires, Sarah Kora Dayanova (la Reine des Dryades) et Mélanie Hurel (Cupidon). La variation de Dulcinée est le point culminant de l’acte et recueille des applaudissements nourris.
On monte encore d’un cran dans le dernier acte. Toute la troupe semble s’être mise au diapason de Kitri-Ludmila. Quel pas de cinq enthousiasmant dans la taverne avec un très élégant Christophe Duquenne (Espada)! La danse et la comédie se mêle harmonieusement, avec la mort simulée de Basilio. Enfin, vient le grand pas de deux du mariage: une vingtaine de minutes de rêve avec de l’explosivité, des équilibres périlleux (petit frémissement dans l’audience lorsque Karl Paquette rattrape tardivement Ludmila) et la grâce tout simplement. L’endurance de ces artistes est en tout cas remarquable, car ils sont encore capables de jouer et de faire ressentir des émotions, alors qu’on les imagine épuisés.
C’était au final, une très belle représentation avec des artistes qui ont pu être injustement critiqués: elle, étant considéré comme une technicienne sans âme, lui comme un partenaire de choix pour les ballerines, attachant mais pas assez technique, éternel remplaçant de collègues plus cotés mais blessés.
Avec quelques soirées supplémentaires (en espérant qu’il n’y ait pas la soirée de trop), ils devraient pouvoir encore approfondir leur interprétation.
Mots Clés : Don Quichotte,Karl Paquette,Ludmila Pagliero