C’était la distribution du Don Quichotte de Noureev, attendue avec impatience par de nombreux balletomanes, et pourtant aucune étoile à l’affiche ce soir. Kitri et Basilio sont incarnés par deux brillants sujets, Mathilde Froustey et Pierre-Arthur Raveau.
Mathilde Froustey est déjà fort bien distribuée, même si, la faute à des concours de promotion mal négociés, elle stagne dans la classe des sujets. Pierre-Arthur Raveau est quant à lui sur une trajectoire ascendante et rapide vers les sommets.
Difficile de faire une comparaison avec la première, car, globalement, la représentation du 16 novembre était techniquement plus aboutie avec un sans-faute de Ludmila Pagliero et un partenariat exemplaire de Karl Paquette, mais le charme du couple Mathilde Froustey/Pierre-Arthur Raveau rachète les petites imperfections de la soirée et emporte l’adhésion.
Au premier acte, les deux protagonistes font une entrée en douceur dans le ballet. J’ai vraiment aimé l’entrée de Mathilde Froustey moins explosive que chez Ludmila Pagliero, mais pleine de légèreté. Pierre-Arthur Raveau a une danse moins puissante que Karl Paquette, mais il est à l’aise sur les tours en l’air de la première variation, avec des réceptions bien assurées. La pantomime des danseurs est très lisible, y compris du deuxième balcon: on sent bien leur complicité, notamment dans la scène du menuet. Petit bémol et frayeur pour Mathilde Froustey, sur le final, avec des portés à une main escamotés.
La musicalité des deux interprètes dans la promenade au clair de lune du second acte procure une jolie émotion. Pierre-Arthur Raveau y déploie sa ligne de prince de ballet. On passe sur la scène des gitans, à mon avis un peu moins enlevée que le 16 novembre, pour retrouver le Royaume des Dryades: Mathilde Froustey, bien entourée de la gracieuse Héloïse Bourdon en reine des Dryades, et de Marine Ganio en Cupidon, touche au sublime.
Je suis résolument fan de la scène de la taverne qui initie le 3ème acte. Christophe Duquenne est un Espada qui exécute des prouesses chorégraphiques comme si de rien n’était, et Pierre-Arthur Raveau semble bien s’amuser. Enfin, ce grand pas de deux, que je pourrais revoir à l’infini. C’est presque angoissant, car on est sur le fil du rasoir tout du long: quels équilibres de la ballerine, quelle osmose entre les deux partenaires! Les secondes qui s’égrennent sur le dernier équilibre déclenchent un enthousiasme mérité dans la salle. On reste assez longtemps sur cette impression pour oublier que Pierre-Arthur Raveau passe sa variation à l’énergie, et que les fouettés de Mathilde Froustey sont un peu désaxés.
Dommage que suite à une blessure de Pierre-Arthur Raveau (muscle froissé) au 3eme acte, lui et Mathilde Froustey ne puissent avoir une deuxième représentation.
Petit bonus, une vidéo postée par Mathilde Froustey sur You Tube:
P.S. : Le jeu de chaises musicales continue sur les distributions de ce Don Quichotte: jeudi, Ludmila Pagliero et Mathieu Ganio ont remplacé Dorothée Gilbert et Karl Paquette qui ont remplacé samedi Mathilde Froustey et Pierre-Arthur Raveau. Enfin, ultime coup de théâtre, dimanche, Dorothée Gilbert et Karl Paquette ont été remplacés par Mathilde Froustey et François Alu qui a donc fait une prise de rôle prématurée avec une partenaire avec laquelle il n’avait pas répété.
Mots Clés : Don Quichotte,Mathilde Froustey,Pierre-Arthur Raveau