L’automne chorégraphique à Paris sera sous le signe de William Forsythe. La première étape de ce parcours en forme de portrait du chorégraphe américain a lieu au Théâtre du Châtelet avec le Ballet de l’Opéra de Lyon dans un tryptique créé pour le Ballet de Francfort, Limb’s Theorem.
Pour ceux qui, comme moi, ne connaissait du maître que des extraits de In the Middle Somewhat Elevated l’incursion pendant 1h30 dans son univers peut s’avérer légèrement oppressante. Qui plus est la configuration à l’italienne de la salle du Châtelet ne favorise pas un confort optimal pour les spectateurs (y compris à de supposées bonnes places) sur ces pièces dont la scénographie joue énormément sur les clairs obscurs et où l’action est partout sur scène, mais souvent décentrée.
Passé les premières minutes où l’on écarquille les yeux pour apercevoir les corps des danseurs dans la semi-obscurité qui règne sur le plateau, on se laisse happer par la mécanique implacable de cette étude sur les infinies possibilités de se mouvoir pour le corps humain, un « théorème des membres ». Les corps dansants s’inscrivent dans un espace scénique articulé autour d’objets géants inspirés par les formes apparaissant dans les dessins de l’architecte Daniel Libeskind. Ces objets centraux sculptent géométriquement l’espace en zones d’ombres et de lumières, une fragmentation de l’espace à laquelle font écho les danseurs au travers de duos et de solos se répondant en différents points du plateau.
On peut trouver à tout cela la froideur clinique d’une danse de laboratoire, chercher en vain un message ou une émotion, si ce n’est qu’il y a une énergie tribale qui se dégage des danseurs portés par la musique électronique de Thom Willems et qui laisse le spectateur sonné, notamment dans la pièce centrale, Enemy in the Figure. J’y ai vu pour ma part une réflexion sur l’aliénation de l’individu dans la société moderne, sur le conformisme ambiant, empreinte d’un certain optimisme puisque, dans un final aux accents de « musical », les danseurs semblent se libérer de l’emprise des machines.
Limb’s Theorem sera repris à la Maison des Arts de Créteil du 4 au 6 décembre.
Sur les références très riches de William Forsythe en particulier lors de la création de ce ballet, une étude de Biliana Fouilhoux parue dans la revue Loxias donne un éclairage intéressant. Il n’est évidemment nul besoin de comprendre tout cela pour apprécier le spectacle.
Mots Clés : Ballet de l'Opéra de Lyon,Limb's Theorem,William Forsythe